Six Sigma ou 6 Sigma est une marque déposée de Motorola
désignant une méthode structurée de management
visant à une amélioration de la qualité et de l'efficacité des processus. La méthode Six Sigma a
d’abord été appliquée à des procédés industriels avant d’être élargie à tous
types de processus, notamment administratifs, logistiques, commerciaux et
d'économie d'énergie. Depuis le début des années 2000, elle connaît un grand
essor en raison de la complexité des organisations et de l'internalisation des
processus qui imposent une vision globale des problèmes.
La méthode Six Sigma se base sur une démarche
fondée à la fois sur la voix du client (enquêtes, etc.)
et sur des données mesurables (par indicateurs)
et fiables. Cette méthode est utilisée dans des démarches de réduction de la
variabilité dans les processus de production (ou autre) et au niveau des
produits et vise ainsi à améliorer la qualité globale du produit et des
services.
Le symbole de six sigma.
Sommaire |
Histoire
L’histoire de Six Sigma débute en 1986 chez Motorola, mais
la méthode devient célèbre dans les années 1990 lorsque General
Electric décide de l’appliquer et de l’améliorer. Motorola avait cherché à
mettre en place une méthode pour améliorer ses processus de fabrication en vue
de satisfaire ses clients.
Mikel Harry, ingénieur chez
Motorola, définit les bases de Six Sigma en s’appuyant sur la philosophie de William Edwards Deming (roue
de la qualité). Il propose d’analyser les instabilités du processus de
fabrication à l’aide des outils statistiques et donne la priorité à l’amélioration continue.
Dès lors, Motorola décide d’utiliser cette méthode pour tous les projets.
Origine de l'appellation
En statistiques,
la lettre grecque
sigma σ désigne l'écart
type ; « Six Sigma » signifie donc « six fois l'écart
type ». L'écart type pouvant être assimilé à la dispersion d'un processus,
on parle aussi d'étendue comme paramètre de dispersion : l'étendue R (range
en anglais) est la différence entre la valeur maxi et la valeur mini d'un
échantillon. L'écart type est également la racine carrée de la somme des
différences au carré de chaque valeur par rapport à la moyenne de l'échantillon
considéré.
Le principe de la méthode consiste à faire en
sorte que tous les éléments issus du processus étudié, soient compris dans un
intervalle s'éloignant au maximum de 6 sigma par rapport à la moyenne générale
des éléments issus de ce processus. En réduisant la variabilité des produits du
processus, on réduit le risque de voir le produit (ou service) rejeté par son
destinataire car en dehors de ses attentes ou spécifications. Le principe vise
donc à travailler sur le processus afin que seuls des produits conformes aux
exigences soient livrés : produire juste dès la première fois en éliminant
les coûts liés aux retouches, recyclage, mise au rebut et risque de vente d'un
produit non conforme.
Concept
Un processus industriel ou un service comprend un
certain nombre de tâches répétitives, l'exemple le plus simple étant la
production d'une pièce en grande série. Une pièce ou une prestation est
conforme si elle respecte un certain nombre de critères, mais les pièces ou les
services ne sauraient être strictement identiques. L’esprit Six Sigma consiste
à améliorer le processus pour que ces produits soient tous bons, il ne s’agit
pas de contrôler les produits mais bien d’être sûr que le processus est fiable1.
Le concept ne s’applique pas qu’à la production,
mais aussi à la logistique, au développement … il suffit d’avoir un processus
dont les performances sont mesurables1.
En pratique la limite de 6σ est difficilement atteignable et les entreprises
peuvent rechercher le 3σ ou 4σ. Toutefois certaines applications exigeantes
comme dans l’aéronautique peuvent demander un objectif de 20σ.
Exemple
Prenons le cas d'une pièce mécanique dont la
longueur nominale est L. La pièce est utilisable si la longueur est
comprise entreL-ΔL et L+ΔL (2ΔL est
l'intervalle de tolérance). Le processus de production, lui, produit des pièces
dont la longueur varie, la longueur moyenne est L, et avec un écart
type σ (on suppose que cette longueur suit une loi normale).
En général, le processus est réglé afin que l'on
ait σ = ΔL/3 ; on écrit en général plutôt ΔL = 3×σ, mais
c'est bien ΔL qui est une contrainte (la pièce est utilisable ou non) et
σ qui est ajusté (les machines sont plus ou moins bien réglées). Ceci conduit à
un taux de rebut de 0,27 %, soit 2 700 pièces
au rebut pour une production de 1 million de pièces.
Si l'on améliore le processus et que l'on diminue
σ jusqu'à avoir ΔL = 6×σ, on aura un taux de rebut de 2×10-9
(0,0000002 %), soit deux pièces au rebut par
milliard de pièces produites.
On se situe donc avec 6σ bien au-delà du taux de
rebut de 3,4 pièces défectueuses par million de pièces produites, qui est la
valeur couramment admise pour une approche « Six Sigma ». En fait,
l'approche « Six SIGMA » tient compte d'une déviation de la moyenne
de 1,5 σ. Pour un processus qui suivrait une loi normale, il
« suffirait » en fait de rester dans un intervalle de + ou - 4,5 fois
l'écart typ. Pour retrouver l'objectif d'un taux de rebut de 3,4 par million
maximum, il suffit d'appliquer les formules à 4,5 σ (6 σ - 1,5 σ) sur un seul
côté de la gaussienne. Il faudrait en fait rajouter la valeur à 7,5 σ (6 σ +
1,5 σ) pour tenir compte de l'autre côté de la gaussienne, mais ces valeurs
très faibles sont négligeables.
La méthode Six Sigma
Principes
- les attentes mesurables du client (CTQ - Critical To Quality) ;
- des mesures fiables mesurant la performance du processus métier de l'entreprise par rapport à ces attentes ;
- des outils statistiques pour analyser les causes sources influant sur la performance ;
- des solutions attaquant ces causes sources ;
- des outils pour contrôler que les solutions ont bien l'impact escompté sur la performance.
Principe DMAIC
La méthode se base ainsi sur cinq étapes qui se
contractent dans l’acronyme « DMAIC » : Define,
Measure, Analyse, Improve, Control soit « Définir, mesurer, analyser,
améliorer, contrôler »1.
Chaque étape possède des outils différents qui
sont regroupés dans une démarche cohérente. Typiquement, la gamme d'outils
utilisés dans chacune des phases est (cette liste n'est pas exhaustive) :
- Définir : voix du client, SIPOC (Supplier Input Process Output Customer — cartographie des processus), …
- Mesurer : analyse de systèmes de mesure (Gage R&R, linéarité, …), capacités, diagrammes d'Ishikawa…
- Analyser : cartographie détaillée des processus (par exemple, analyse de la valeur ajoutée), tests d'hypothèses (ANOVA, χ², tests de variances, …), plans d'expérience…
- Améliorer : plans d'expériences, AMDEC, poka yoke…
- Contrôler : plans d'expérience, MSP…
Six Sigma va permettre de réduire les coûts et
les pertes pour tendre vers des résultats optimums en termes de profit et de
qualité. Les objectifs pour l'entreprise sont de se doter d'actions mesurables
et efficaces, de satisfaire ses clients, d'impliquer les équipes et bien
souvent d'améliorer son image.
Lorsqu'un processus ne peut être amélioré alors qu'il
ne répond plus aux attentes du client, Six Sigma se décline aussi en méthodes
de création de nouveaux processus ou de nouveaux produits sous le nom de DFSS (Design
For Six Sigma). Cette autre méthode se décompose aussi en 5 étapes qui se
contractent en DMADV pour « définir, mesurer, analyser, développer (Design
en anglais) et
vérifier ».
Six Sigma et la conduite du changement
Au-delà de la méthodologie,
la réussite d'un programme de Six Sigma doit s'appuyer sur une profonde conduite du changement. Souvent, par facilité
ou pour gagner du temps, les entreprises tendent à mettre en place des
solutions toutes faites qui répondent selon elles à des problèmes
(exemple : je mets en place un ERP type SAP, car je
n'arrive pas à contrôler mes coûts de manière exacte). Avec la méthode Six
Sigma, l'objectif est de bien cerner le problème, à travers des analyses de
processus ou de mesures (ex : les mesures indiquent une mauvaise
comptabilisation des dépenses durant les périodes de vacances ou les périodes de
pic car des stagiaires formés trop rapidement prennent la relève de personnel
en place durant ces périodes). Une fois le problème bien identifié, la solution
est souvent à portée de main (mieux anticiper les pics et vacances, mieux
former les stagiaires, avoir un contrôle renforcé sur les saisies des
stagiaires, limiter les saisies des stagiaires sur des opérations simples et
faciles à contrôler, etc.). Si nous prenons l'exemple précédent, la mise en
place d'un ERP n'aurait sans doute pas résolu le problème et aurait coûté très
cher, à la différence du deuxième type de solution.
Néanmoins, cette démarche va souvent à l'encontre
des habitudes de la société, d'où un accompagnement indispensable pour éviter
d'aller au-devant d'un blocage ou d'un enlisement.
Le soutien de la direction est indispensable sous
peine de se retrouver avec une initiative de courte durée (fad en
anglais). Des projets courts montrant des résultats concrets avec des projets
plus longs procurant des bénéfices à plus long terme permettent notamment de
soutenir ce type d'initiative.
Les acteurs du Six Sigma
La méthode Six Sigma concerne toutes les strates
d'une organisation et s'appuie sur plusieurs ressources humaines qui lui sont
propres. L'image communément admise est celle d'une pyramide de fonctions de
savoir-faire croissants :
- Le Green Belt (« ceinture verte »), dont on attend qu'il consacre partiellement son temps (souvent autour de 25%) à la conduite de projets d'amélioration.
- Le Black Belt (« ceinture noire »), chef d'équipe qui se consacre à plein temps à l'amélioration (conduite de projets, formation des Green Belts voire d'autres Black Belts) et doit maîtriser la méthode dans son ensemble. Il est plus spécialisé soit en DMAIC, soit en DFSS.
- Le Master Black Belt, mentor et formateur de Black Belts, garant du respect de la démarche, encadre les Black Belts.
- Le Deployment Leader ou Champion (en France, « directeur du déploiement » ou plus souvent « directeur du système d'excellence »), chargé d'élaborer la stratégie, le contenu de la formation, les budgets, etc.
Précisons que ces acteurs du Six Sigma ont leurs
propres règles de certification, avec des examens, des académies, des
séminaires professionnels, des rites de passage. Néanmoins, on peut citer la
certification de l'American Society for Quality (ASQ) qui bénéficie d'une
reconnaissance internationale.
Certaines entreprises ont signé des accords de
reconnaissance mutuelle de certification Six Sigma, qui font qu'une
certification Six Sigma mérite de figurer dans un CV.
Les nouvelles tendances
Le Lean 6 sigma (LSS)
Une autre méthode est de plus en plus associée au
Six Sigma, le Lean
(Outils comme Value Stream Mapping, Takt Time, Spaghetti Diagram…). Le Lean
6 Sigma prend de plus en plus le pas sur le « pur » Six Sigma[réf. nécessaire].
Le 6 Sigma et le Lean Manufacturing
restent distincts. Le Lean Manufacturing permet de construire un système
de production basé sur une philosophie et des outils intégrés. Le 6 Sigma est
la maîtrise d'un procédé. L'utilisation d'outils lean dans 6 Sigma peut
permettre d'atteindre un résultat, mais ne peut pas se substituer au Lean
Manufacturing tel que compris dans l'industrie.
L'association des deux termes est dans certains
cas considérée comme du marketing, car issue de deux méthodes éprouvées dans le
temps et intrinsèquement suffisantes. D'autre part, on associe un outil (6
sigma) à un système (ensemble d'éléments dont des outils).
Le Design for 6 Sigma (DFSS)
Mise en œuvre d'une démarche qualité dès la conception de nouveaux
processus. L'objectif est un produit ou un service répondant aux exigences du
client. Les outils utilisés sont, par exemple, les matrices de KANO ou la
maison de la qualité.
Les formations
Les formations disponibles sur le marché ont pour
objectif de permettre aux différents acteurs (cf plus haut) d'accroître leurs
compétences. Il y a des formations courtes (2 à 3 jours) pour les Champions
(ou Deployment Leaders) et des programmes plus longs (plusieurs sessions
sur 3 à 6 mois) pour les Green Belts et les Black Belts. Les
programmes de formation-action sont le meilleur moyen de lancer des projets Six
Sigma dans les organisations.
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